Le réalisateur japonais Genki Kawamura transpose l’univers claustrophobe du jeu vidéo éponyme sur grand écran dans un thriller psychologique oppressant, arrivé dans les salles françaises ce mercredi 3 septembre.
Un piège souterrain aux règles mystérieuses
L’intrigue débute dans l’atmosphère suffocante du métro tokyoïte aux heures d’affluence. L’ambiance feutrée, où chaque passager reste plongé dans son smartphone, est brutalement brisée par les pleurs d’un nourrisson et la colère explosive d’un voyageur contre la mère et son enfant, révélant l’indifférence générale des témoins.
Le protagoniste quitte alors sa rame pour s’engouffrer dans un dédale de couloirs souterrains identiques. C’est à ce moment qu’il reçoit un appel bouleversant : son ancienne compagne s’apprête à donner naissance et souhaite sa présence. Tiraillé entre ses émotions, l’homme se retrouve littéralement perdu dans ce réseau labyrinthique qui semble ne mener nulle part.
Prisonnier de cette boucle spatio-temporelle, le personnage découvre les conditions de son évasion : franchir huit étapes correspondant aux huit issues possibles du réseau. Le principe paraît simple : détecter toute anomalie dans l’environnement impose un retour en arrière, tandis que l’absence de changement autorise la progression.
Une esthétique vidéoludique au service de l’angoisse
Fidèle à son matériau d’origine – le jeu vidéo sorti en 2023 -, le film adopte délibérément les codes du medium interactif. Genki Kawamura multiplie les plans séquences et privilégie la caméra subjective, transformant le spectateur en observateur direct. Cette approche visuelle rappelle constamment l’univers gaming : interactions limitées avec le décor, changements de perspective narrative et mouvements de caméra épousant la hauteur humaine.
L’efficacité du récit repose sur sa capacité à transformer le spectateur en complice de la quête. Chaque recoin de couloir devient un élément à analyser, chaque rotation génère une tension palpable. Conscient du risque d’essoufflement lié à la répétition, le réalisateur introduit des changements de perspective radicaux, abandonnant soudainement un personnage pour adopter le regard d’un autre, relançant constamment l’intrigue.
Une métaphore sociale percutante
Au-delà de son aspect spectaculaire, « Exit 8 » fonctionne comme une allégorie de notre époque. Le tunnel souterrain évoque l’environnement professionnel moderne et une société gouvernée par le non-dit. Inspiré par les travaux de l’artiste hollandais Maurits Cornelis Escher sur les illusions architecturales, le film invite à l’éveil des consciences.
Le message se révèle progressivement : face aux dysfonctionnements et aux injustices, l’indifférence n’est plus acceptable. Dans cet univers clos qui reflète nos comportements sociaux, Kawamura nous rappelle qu’ignorer les problèmes ne les fait pas disparaître – il faut parfois accepter de faire demi-tour pour mieux avancer et combattre l’injustice.
